Le paradoxe du ferroviaire : des solutions à long terme pour un outil en crise

Rouler vite, transporter des millions de personnes chaque jour, relier les territoires : le ferroviaire est un outil d’avenir. Et pourtant, depuis plusieurs dizaines d’années, on constate un glissement, de plus en plus marqué, de la qualité de service.

Jeudi dernier, j’ai organisé une réunion publique sur le ferroviaire. Le constat partagé est amer : usagers comme agents dénoncent l’état d’un réseau qui se dégrade, de retards devenus quotidiens, de suppressions de trains, de fermetures de guichets. Ce qui était un atout devient un frein au quotidien. 

Les transports sont aujourd’hui en train de craquer car saturés par un manque d’anticipation de leur utilisation. Alors que plus en plus de personnes l’utilisent, il est victime de choix politiques contraires à l’intérêt général, privilégiant l’argent à l’entretien et à la modernisation du réseau. 

Beaucoup ont applaudit des deux mains lorsque ces choix libéraux ont été pris, pensant qu’en effet le privé ferait bien mieux.

Beaucoup pensaient que les privatisations, la mise en concurrence, la transformation de la SNCF en société anonyme, les suppression du statut des cheminots et des agents RATP révolutionneraient  leur quotidien,  ou que l’éclatement de la SNCF passant d’un EPIC à un SA permettrait qu’elle soit bien plus compétitive… mais en réalité, ces choix ont explosé lentement et bien réellement tout ce qui faisait la force d’une entreprise publique ! On promettait une modernisation, une efficacité nouvelle. Ce que l’on voit aujourd’hui, c’est l’échec total de ces réformes.

Maintenant qu’on a du recul sur cette politique libérale, on se rend compte des dommages que ces réformes ont causé : Une casse terrible d’un outil pourtant exceptionnel. ⤵️

  • On a jamais eu autant de mal à recruter : la fin du statut a fait fuir les vocations.
  • La concurrence désorganise tout : elle empêche la solidarité entre les lignes rentables et les lignes rurales. L’arrivée du privé est en train de déséquilibrer tout le système ferroviaire,  qui était basé sur la solidarité entre les lignes rentables et les lignes rurales (on appelle ça la péréquation tarifaire, les lignes déficitaires étaient équilibrés par les bénéficiaires) 
  • La logique de rentabilité prend le dessus sur l’intérêt général :  le passage en SA est la porte ouverte à la recherche de la rentabilité plutôt qu’au développement du service public. 

A cela s’ajoute un désengagement complet de l’État qui n’assume pas son rôle et encore moins ses responsabilités en abandonnant totalement le financement du ferroviaire. Le réseau est à bout de souffle, les gares sont laissées à l’abandon, des lignes supprimées, et un sentiment d’abandon souffle dans les territoires. Alors oui ce n’est pas en un coup de baguette magique que l’on redonnera du sens au ferroviaire mais c’est en agissant maintenant que l’on peut éviter la catastrophe annoncée ! 

Aujourd’hui tout nous montre que la France et ces choix politiques et stratégiques ne sont pas les bons et nous emmènent droit dans le mur. D’autres pays, pionniers dans la libéralisation du rail, comme la Suède, la Norvège, ou l’Angleterre, tous font aujourd’hui marche arrière après avoir cru au mirage de la privatisation. Et nous, en France, on continue à foncer droit dans le mur ?

L’histoire de la SNCF s’est construite sur l’incapacité des sociétés privées à faire rouler correctement les trains. 80 ans après, on repart à la case départ. Ça suffit !

Il est temps de changer de cap : 

  • Remettre de l’argent sur la table pour l’entretien et la modernisation du réseau.
  • Revenir à une vision d’ensemble : coordonner le rail et la roue et non plus qu’ils s’opposent, afin de retrouver de la cohérence dans les horaires et les trains. 
  • Redonner un statut pour fidéliser les salariés et avoir un effectif suffisamment conséquent pour tenir le plan de transport. 
  • Et enfin, il faut arrêter avec cette ouverture à la concurrence qui pompe l’argent des voyageurs, empêche la mutualisation des moyens et anéantie toute réactivité dès lors qu’il y a un incident… qui fragmente, affaiblit et détourne les fonds publics. 

Ce ne sera pas instantané. Mais si on ne commence pas maintenant, on scelle la mort d’un outil pourtant essentiel à la transition écologique et à l’égalité entre les territoires.

Le ferroviaire est un bien commun. Il mérite mieux que l’abandon. Il mérite une stratégie publique, claire, ambitieuse. Des solutions existent. Et la première d’entre elles, c’est votre bulletin de vote. Ne laissons plus les fossoyeurs du rail décider à notre place.